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Interview de Son Excellence Monsieur le ministre Jean-Claude Gakosso : Congo : Une diplomatie de proximité (1)

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A partir de ce numéro, nous entamons une présentation de notre diplomatie. Le Congo est ce que sont ses populations, mais il est aussi ce que sont ses liens avec les autres. La diplomatie, dans ce dernier cas, joue un rôle-clé dans un monde où personne n’est seul et où ce que fait le voisin a forcément des retombées chez soi. On n’est pas isolés, mais qui sont nos amis ? Quels sont nos souhaits ?

Comment le Congolais doit-il se sentir face au devoir de solidarité alors qu’il a ses problèmes propres? Nous avons posé ces questions en trois volets au ministre des Affaires étrangères, de la Coopération et Congolais de l’étranger, M. Jean-Claude Gakosso.  Interview exclusive à suivre.
*Monsieur le ministre, autour du Congo, des situations de crise appellent un regard de compassion: Centrafrique, RD Congo notamment. Le Congo y répond-t-il?
**De longues frontières nous unissent (au lieu de nous séparer) aux pays que vous venez de citer; les populations et les langues sont les mêmes de part et d’autre de ces frontières. Permettez-moi tout simplement de vous rappeler la sagesse des Anciens: «Quand la maison du voisin brûle, il ne faut pas se contenter de regarder les flammes. Il faut promptement apporter de l’eau pour éteindre le feu...avant qu’il n’embrase votre propre maison.»
S’agissant de la République Centrafricaine, je peux rappeler l’engagement sans faille de Son Excellence Monsieur le Président de la République à trouver une solution à la grave crise dans laquelle ce pays frère avait sombré en 2013.
Le Congo a conduit avec dextérité la médiation internationale dans cette crise. Un travail de Sisyphe qui a finalement abouti à la tenue des élections Présidentielle et législatives. Le retour à un ordre constitutionnel normal a été unanimement salué par la Communauté internationale. Aujourd’hui, hélas, de nouveaux dangers sont apparus, qui menacent la paix encore si fragile en
Centrafrique. La République du Congo demeure aux cotés de ce pays frère par sa présence dans le Panel des Facilitateurs, institué dans le cadre de l’Initiative Africaine pour la paix en RCA.
La situation en RDC nous préoccupe au plus haut point. Et pour cause! L’histoire, la géographie, la sociologie, les moeurs, les usages et...d’inextricables liens familiaux, tout ou presque nous lie à ce grand pays qui partage également des frontières avec huit autres pays de notre sous-région. Dans ce pays frère, le consensus politique pour des élections apaisées, programmées pour la fin de cette année, tarde à clairement se dessiner. Notre Président, qui a l’avantage d’une longue expérience politique, qui s’est rodé dans des médiations complexes et qui connaît les acteurs clés du jeu politique en RDC, ne cesse de déployer des efforts pour amener au dépassement la classe politique et la société civile de ce pays. Tout ceci, afin que soit privilégié l’intérêt supérieur de la nation, au-delà des contradictions et rivalités que l’on sait inhérentes au système démocratique. La
date des élections cumulées est désormais connue. Nous avons de bonnes raisons de croire que ce pays chemine, à son rythme, vers une issue heureuse à la crise qu’il traverse.
Toujours autour de nous, le Congo se tient aux côtés du Cameroun et du Tchad, ces deux autres pays frères, qui font face aux exactions criminelles du mouvement terroriste Boko-Haram.
L’action de la diplomatie congolaise dans le règlement des crises dans la sous-région se trouve amplifiée et encouragée par la confiance de nos partenaires à travers les mandats qui lui sont confiés: la présidence de la Conférence Internationale sur la Région des Grands Lacs (CIRGL), celle du Mécanisme régional de suivi de l’Accord-cadre pour la Paix, la Sécurité et la Coopération pour la République Démocratique du Congo et la Région, et, il y a 48 heures, l’élection de SEM le Président de la République en tant que 3e Vice-président de l’Union Africaine pour la région Afrique Centrale.
Au niveau ministériel, le Congo assumera, à compter de juin 2018, la Présidence du Comité Consultatif sur les Questions de Sécurité en Afrique Centrale (UNSAC), cette conférence cyclique des Nations Unies sur les questions de sécurité en Afrique Centrale.

*Le Congo fait face, lui aussi, à des défis auxquels il faut répondre. Comment la diplomatie concilie-t-elle les difficultés en interne et la solidarité en externe?
**L’action diplomatique n’est pas isolée de l’action gouvernementale en général. Notre pays traverse une passe difficile sur le plan économique et financier. Comme l’ensemble des départements ministériels, le Ministère des Affaires Étrangères, de la Coopération et des Congolais de l’Etranger fait face à des réajustements rendus nécessaires, notamment à la réduction de son budget pour l’année 2018. Notre budget de fonctionnement a été réduit de 20 %, tandis que l’investissement est réduit de près de 50%. Je voudrais à ce propos faire observer que la réduction des moyens financiers ne date pas d’aujourd’hui. La conjoncture difficile que vit notre pays depuis 2014 ne nous a pas empêchés en 2017 d’obtenir des résultats satisfaisants. Le contexte actuel, évidemment un peu plus
difficile qu’il y a 2 ou 3 ans, nous oblige à plus de réalisme et de pragmatisme, à plus d’intelligence et d’ingéniosité, mais également à plus d’abnégation, voire d’esprit de sacrifice.

* La notion de solidarité est éminemment chrétienne: est-elle aussi républicaine à vos yeux?
**Oui, bien sûr, la solidarité est aussi républicaine. L’histoire de la Commune de Paris et la tragédie des Communards sont là pour l’attester. Je pourrais même dire que la République a un coeur et une âme. La République fraternelle et universelle est avant tout un espace de solidarité. C’est cela son fondement moral. C’est son idéal.
Plus prosaïquement, dans le domaine qui est le mien, la solidarité s’illustre notamment dans l’accueil des étrangers en situation de détresse.
En 1997, par exemple, notre pays a accueilli environ 12 000 personnes de nationalité rwandaise auxquelles la qualité de réfugiés «prima facié» avait été reconnue. En remontant plus loin dans l’histoire, on peut se souvenir de ces nombreux Angolais et Namibiens qui avaient trouvé refuge dans notre pays pendant que leurs pays subissaient l’oppression coloniale.
La solidarité de la République se manifeste également à l’égard de ceux de nos compatriotes qui ont volontairement choisi une seconde patrie, mais dont le coeur continue de battre pour le Congo. Le Département des Congolais de l’Etranger, mis récemment en place par le Président de la République, a précisément vocation à faire du Ministère des Affaires étrangères la porte d’entrée pour tous ceux parmi eux qui veulent contribuer au processus de développement national ou exercer leurs droits civiques inaliénables tout en résidant à l’étranger.

(A suivre au prochain numéro : les partenariats)


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