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République Démocratique Congo : Joseph Kabila a reculé, mais le temps des comptes a commencé

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Après le sénat, l’assemblée nationale de la République Démocratique du Congo a adopté, dimanche 25 janvier, la loi électorale révisée, expurgée de la disposition controversée qui avait provoqué, à l’appel de l’opposition, des manifestations réprimées dans le sang par le gouvernement, la semaine dernière.

La communauté internationale a salué cette avancée, mais la controverse se situe, maintenant, dans le bilan de la répression sanglante de ces manifestations. La force publique a fait usage de tirs à balles réelles, suscitant de vives critiques de la part des organisations de défense des droits de l’homme.

Dans un communiqué publié dimanche 25 janvier, Martin Kobler, le représentant spécial du secrétaire général de l’Onu en RDC, «félicite le parlement qui est parvenu à un accord sur la révision de la loi électorale et a démontré la détermination commune des acteurs politiques de préserver la paix sociale en RDC». «La sagesse avec laquelle les parlementaires ont trouvé une solution conciliant les différentes positions, tout en respectant la Constitution, notamment les délais électoraux, est remarquable et salutaire. Cette atmosphère constructive est propice au retour de la paix sociale. Sur cette base, la Céni (Commission électorale nationale indépendante) peut continuer à préparer les élections, notamment en publiant le calendrier électoral global», a-t-il ajouté.  
Il faut dire que c’est le sénat qui avait, le premier, eu la sagesse d’amender la proposition que le gouvernement voulait, à tout prix, inclure dans la loi électorale. Le projet de loi voté par les députés conditionnait la tenue de la prochaine présidentielle à l’achèvement du recensement général de la population. Or, selon les spécialistes, même si ce recensement commençait cette année, il n’allait pas être achevé avant fin 2016. Ce qui allait provoquer la prolongation du mandat de l’actuel chef d’Etat, Joseph Kabila Kabange. D’où les manifestations organisées à l’appel de l’opposition, du lundi 19 au mercredi 21 janvier derniers.
La commission du sénat congolais, chargée d’examiner le projet de loi électorale, avait, à l’ouverture de la séance plénière consacrée au vote de ce texte, vendredi 23 janvier, proposé «un compromis». Dans la version adoptée par les sénateurs, on a retiré la condition du recensement général de la population. «L’actualisation de la liste électorale définitive en fonction des données démographiques disponibles se fait dans le respect des délais constitutionnels et légaux prévus, pour l’organisation des élections présidentielle, législatives, provinciales, urbaines, municipales et locales», précise la nouvelle version, qui a suscité la joie des étudiants du campus universitaire de Kinshasa, théâtre de la répression sanglante des manifestations hostiles au premier projet de loi.
Vital Kamerhe, le président de l’U.n.c (Union pour la nation congolaise), l’un  des partis de l’opposition à l’origine des manifestations de protestation, s’est réjoui de la sagesse des sénateurs, mais se retient de crier victoire. Pour lui, c’est sur le terrain que cela doit se vérifier.
«Nous avons été à l’écoute de la rue... Le vote d’aujourd’hui est un vote historique», a, pour sa part, lancé Léon Kengo wa Dondo, le président du sénat, à l’issue de la séance qui a permis l’adoption de la nouvelle mouture, laquelle a été également adoptée dans les mêmes termes à l’assemblée nationale, le dimanche 25 janvier.
Il aura fallu le lobbying de la communauté internationale, à travers les ambassadeurs accrédités à Kinshasa, pour que «le raïs» recule. Mais, la controverse reste, maintenant, le bilan de la répression sanglante des manifestations.
Selon le porte-parole du gouvernement, Lambert Mende Omalanga, au total, «onze personnes, dont un policier et dix pillards, ont été tués dans les troubles».
Par ailleurs, «343 pillards, arrêtés sur le terrain, en flagrant délit, vont être présentés à la justice», a-t-il précisé.
Le bilan du gouvernement est, cependant, contesté. Dans un communiqué daté à la fois de Paris et de Kinshasa, la F.i.d.h (Fédération internationale des ligues des droits de l’homme) «condamne, fermement, la sanglante répression des manifestations pacifiques contre l’adoption de la loi électorale, qui a déjà fait 42 morts, à Kinshasa, et plusieurs blessés, dans d’autres grandes villes du pays». «Comme cela est, malheureusement, devenu récurrent, en RDC, les forces de sécurité ont, à nouveau, fait preuve d’une réaction totalement excessive et disproportionnée, en tirant à balles réelles sur des manifestants, faisant 42 morts et des dizaines de blessés», poursuit l’organisation.
Leçon à tirer: non seulement le président Joseph Kabila Kabange n’a pas obtenu ce qu’il recherchait, puisqu’il a dû faire marche arrière dans sa réforme de la loi électorale, mais encore, il lui faut gérer les cadavres provoqués par la répression sanglante des manifestations. Il aurait été sage, pour lui, de ne pas en arriver là.

Joël NSONI

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