La paix n’a pas de prix!
- Détails
- Publié le dimanche 23 octobre 2016 11:34
- Affichages : 10750
Une nébuleuse, la crise sécuritaire dans le Pool? En tout cas, c’est le sentiment que beaucoup de Congolais partagent. Pour eux, la Force publique aurait pu déjà mettre les groupes armés hors d’état de nuire dans le Pool. Mais, l’on ne comprend pas la facilité avec laquelle les nsiloulous opèrent, en attaquant les automobilistes sur les routes, sans se faire prendre. Lassées par une situation que l’on croyait à la portée de la Force publique, des voix demandent le dialogue politique.
Bien sûr, personne n’est contre le dialogue. Mais, quelle société, quelle démocratie construirait-on, s’il faut se mettre à côtoyer, dans la vie politique ou publique, des acteurs ayant commis des crimes qu’on peut qualifier d’actes terroristes?
Franchement, la démocratie ne peut fonctionner que dans le contexte d’un Etat disposant d’institutions fortes. L’Etat a le monopole de la force armée, pour que, justement, aucun citoyen n’impose ses points de vue ou prenne l’autorité de l’Etat par la force. Force doit être à la loi, comme disent les gendarmes.
En démocratie, la loi est le reflet des valeurs d’une société et de la volonté de la majorité, même si la raison n’est pas toujours du côté de la majorité. C’est le fondement de l’Etat de droit. C’est pourquoi, l’Etat fait usage de la force armée dont il a le monopole, pour rétablir l’ordre public et faire respecter la loi, à chaque fois qu’elle est transgressée par un groupe de citoyens recourant à des moyens armés.
Lorsque des citoyens prennent des armes et veulent affronter l’autorité de l’Etat, il faut savoir que celui-ci réagit impitoyablement, dans les limites, bien sûr, de ce que prescrit la loi. L’Etat est jaloux de son autorité et jamais il n’entendra la concéder. L’ère des milices armées, des résistances armées pour des revendications politiques est révolue. Depuis le «Plus jamais ça», tout doit se faire suivant les mécanismes démocratiques prévus, même la contestation des résultats d’une élection. C’est comme ça que nous donnerons la chance au développement de notre pays; le développement étant un processus cumulatif. Détruire à chaque fois ce qu’on a réalisé péniblement, parce qu’il faut prendre les armes à chaque revendication politique, c’est saper les bases même du développement et au-delà, celles de l’unité nationale.
Pour juger les Nazis, qui avaient commis des crimes de guerre en masse, durant la Seconde guerre mondiale, il avait fallu d’abord les vaincre militairement. Autrement, ils auraient échappé à la justice internationale et pire, imposé leur idéologie.
Dans le Pool, beaucoup de personnes se disent surprises et même indignées de voir la force publique renforcer sa présence, pour traquer des fugitifs recherchés par la justice. Dans quel pays on aurait procédé autrement? Que voit-on en France, quand il y a des attaques terroristes? Le président Hollande n’ordonne-t-il pas à l’armée d’occuper l’espace public pour protéger les Français?
On ne peut pas rétablir la paix et la sécurité au Pool, en caressant les groupes armés dans le sens du poil. Il faut, certes, donner la chance de sortie aux jeunes qui veulent abandonner les armes et revenir à la vie normale. Le mouvement de Ntumi ayant entraîné des centaines, voire des milliers de jeunes peu conscients des visées obscurantistes de celui qui se présente à eux comme un pasteur. Ces jeunes posent un réel problème de réinsertion sociale que la Force publique ne saurait leur assurer. L’action du gouvernement et des partenaires internationaux est ici nécessaire.
Au-delà, le gouvernement devrait décréter le Pool comme département d’urgence sécuritaire et humanitaire, dès lors que la Force publique y traque des groupes armés se livrant à des actes terroristes. Pour l’instant, l’objectif est clair : rétablir l’ordre public et livrer les fugitifs à la justice. Mais, il y a lieu de craindre un pourrissement de la crise, si jamais on n’y arrive, dans un temps précis.
Joachim MBANZA