Sauver l’essentiel !
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- Publié le vendredi 29 janvier 2016 10:24
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Il y a une pensée à la mode au niveau des médias internationaux où l’on pense que l’Afrique est un continent homogène tel que ce qui s’est produit au Burkina Faso doit forcément l’être dans le reste de l’Afrique. C’est refuser de ne pas voir la diversité culturelle et politique du continent africain où chaque pays, chaque Nation forge son destin dans le contexte international qui est celui du 21ème siècle.
La démocratie avance sur notre continent, mais suivant les réalités propres à chaque pays, elle avance un peu plus vite ici, un peu moins là et ainsi de suite. Il faut avoir une approche modeste, réaliste et objective de ces réalités complexes, pour ne pas forcer le destin de la démocratie en Afrique. On ne peut pas apprécier de la même manière l’évolution démocratique au Rwanda, pays qui a connu un génocide effroyable, à caractère ethnique, et le Burkina Faso où le double assassinat d’un président et d’un journaliste a beaucoup pesé sur son destin démocratique.
Le Congo est souvent secoué par des violences fratricides d’origine politique. L’avènement de la démocratie au début de la décennie 90 a été un tournant décisif dans l’histoire de ce pays. Il y a eu au Congo des élections démocratiques appréciables et une alternance pacifique, en 1992, qui a suscité un grand espoir sur l’avenir. Malheureusement, la suite nous a plongés dans la désillusion: une démocratie mal vécue avec des conflits armés à répétition, l’exacerbation du tribalisme, l’effondrement de l’autorité de l’Etat à cause du règne des milices et des ethno-partis qui s’étaient partagé le pays en bastions protégés. C’est un aspect qu’il ne faut jamais oublier dans l’analyse de la situation congolaise. C’est le président du Rassemblement citoyen, le ministre Alphonse Claude N’Silou, qui a rappelé dans un récent message le sort souvent réservé aux anciens chefs d’Etat congolais. Convenons-en avec lui qu’il faut mettre un terme à un tel cycle de violences qui sous-tend la course au pouvoir.
Quand le discours politique est imbibé de haine et de sentiment de vengeance, quand les partis fanatisent leurs bases comme on l’a vu, la priorité, c’est d’arrêter la mécanique infernale et sauver l’essentiel, la paix et l’unité nationale. Les médias internationaux ne voient pas ces aspects et exigent simplement que les principes démocratiques soient respectés. Soit! Mais, quand on voit la Syrie, la Libye, le Burundi, etc., ce qui est rassurant, c’est que le Congo a évité le pire. Après un passé douloureux, il faut travailler dur pour asseoir des institutions qui puissent jouir de la confiance de la Nation. Pour cela, le dialogue, toujours le dialogue est l’unique voie pour progresser dans la paix, en surmontant les difficiles écueils qui se dressent sur le chemin de la démocratie. Il serait souhaitable qu’avant d’engager les hostilités électorales, la classe politique et la société civile donnent les gages de se retenir de toute tentation de nature à remettre la paix et l’unité nationale en cause. C’est sans doute le moment de faire écho à l’appel de l’archevêque de Brazzaville, Mgr Anatole Milandou, qui disait: «C’est maintenant le moment de la conversion, de se remettre en question, de quitter les vues étriquées de l’égoïsme. Le temps est venu de penser enfin Nation, de penser Congo, tout le Congo, tous les Congolais. Nous avons déjà perdu beaucoup de temps, mais nous pouvons encore sauver ce qui nous reste: la cohésion nationale. C’est donc au carrefour du dialogue que je vous demande de revenir. Dans la situation présente de notre pays, refuser de se parler, avec sincérité et avec désir de s’accorder, serait cynique, voire diabolique -si vous me permettez cette expression-. Ce serait s’obstiner à s’enfermer sur soi-même, à s’engager dans une voie sans issue, dans un suicide collectif».
Joachim MBANZA