En démocratie, le dialogue est une vertu
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- Publié le samedi 20 juin 2015 08:10
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En tant qu’Africain et chrétien, l’exhortation de l’archevêque de Brazzaville, Mgr Anatole Milandou, lors de la messe pour la consolidation de la paix, ne laisse pas indifférent. Au contraire, c’est même un stimulant à l’engagement citoyen des chrétiens. Que dit le prélat? «…En tant qu’Africains, il y a des valeurs que nous apprenons en famille, dans des lieux traditionnels où se donne la vraie éducation, que nous n’avons pas le droit de détruire.
Nous pouvons faire, grâce à notre génie créateur et, pour nous chrétiens, avec l’aide de l’Evangile, promouvoir des valeurs sociales, culturelles, démocratiques et économiques, inspirées, dans la mesure du possible, de nos cultures. Tout n’y est pas que mauvais. Au contraire! Dans beaucoup de cultures congolaises, on apprend que «lorsque l’on s’est trompé de chemin, il faut avoir le courage de revenir au carrefour, pour suivre la bonne direction». N’ayons pas honte de revenir, prenons notre courage en mains, mettons en branle notre capacité d’écoute et de dialogue, pour déceler la vraie voie à suivre, pour le bien de tous et pour l’intérêt général. C’est la voie des valeurs de la solidarité, de l’accueil de l’autre, l’écoute, du dialogue, du respect de l’aîné et pourquoi pas du cadet aussi, du chef et du simple citoyen» (1).
Ces paroles profondes nous édifient qu’en démocratie, le dialogue est le moyen qui permet de progresser, en se faisant comprendre, et de surmonter ainsi les contradictions.
En contrepartie, l’absence ou la rupture de dialogue renforce les préjugés qui poussent ou prédisposent à la confrontation violente, pour déboucher sur la raison du plus fort. L’échec des négociations du 14 au 15 septembre 1997, à Libreville (Gabon), à cause du refus du président Pascal Lissouba de se rendre dans la capitale gabonaise, empêcha une issue négociée du conflit armé, pour favoriser la victoire d’un camp sur l’autre. Même s’il s’était fait représenter par son éphémère premier ministre, Bernard Kolélas, les négociations n’eurent pas le même impact que s’il avait été là, lui-même, puisque son protagoniste, le président Sassou-Nguesso, avait fait le déplacement de Libreville. Son renversement, le 15 octobre 1997, se présente, alors, comme la conséquence de son refus du dialogue, devant la communauté internationale, qui avait parrainé le rendez-vous de Libreville. La raison du plus fort s’étant imposée.
Autant dire que devant la communauté, l’attitude de rejeter ou repousser le dialogue est, souvent, considérée comme une volonté de rechercher une solution par la force. Or, la solution par la force ne s’obtient qu’au terme d’un conflit ou d’une confrontation. Ce que la communauté redoute et condamne.
Dans la vie de l’Etat et de la Nation, il faut toujours privilégier le dialogue, pour garantir le climat de paix auquel tout le monde est attaché. En raison de notre passé émaillé de violences engendrées par les intérêts politiques, en plus de la fragilité de notre Nation en construction, les politiciens devraient, plus que jamais, cultiver les vertus du dialogue, de la négociation. Beaucoup l’ont compris, comme on l’a suivi dans les médias, pendant les consultations présidentielles. Mais, il y en a qui ont besoin d’y être convertis. Car, personne n’est meilleure, au point de se passer des autres. Même ceux qui iront, demain, à la gestion des affaires publiques, ils seront confrontés aux mêmes difficultés que celles dont le peuple se plaint, aujourd’hui. Auréolé, pourtant, de son mythe, Nelson Mandela dût faire face à des contestations sociales, durant sa mandature à la tête de l’Afrique du Sud, surtout dans le domaine de la lutte contre le Sida.
Aujourd’hui, n’est-ce pas que les partis d’opposition ayant pris part aux concertations de Brazzaville, Ewo et Dolisie, ont beau jeu de critiquer, légitimement, le Gouvernement, sur son manque de volonté d’appliquer les conclusions concernant l’amélioration de la gouvernance électorale? Le Gouvernement aurait fait l’effort d’appliquer ces conclusions, sa crédibilité dans les affaires électorales s’en serait trouvée renforcée. A défaut, ses concurrents se méfient de sa gestion des affaires électorales. C’est cela, la force du dialogue. L’édification de la communauté nationale a besoin de leaders visionnaires, capables de transcender les divergences idéologiques et autres, pour privilégier le dialogue.
Joachim MBANZA
Note:
1- Homélie de Mgr Anatole Milandou à la messe pour la consolidation de la paix